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Abdoukarim_Fall_Atelier

A propos

Abdoukarim_Fall_Atelier

Mon CV

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Natif de Guet-Ndar (quartier de pêcheur à Saint-Louis), Abdoukarim Fall, a l’avenir devant lui. Dans la publication du tome 2 de l’ouvrage intitulé « A la rencontre de la jeune peinture sénégalaise », Abdoukarim Fall est présenté comme un jeune dynamique ayant le sens du partage. Le rêve du jeune peintre, c’est de parvenir à «fédérer toutes les énergies, tous les artistes qui œuvrent pour la conservation du patrimoine de la ville de Saint- Louis que nous avons en partage avec le monde».

Travaillant dans son atelier installé dans son domicile, l’artiste tisse d’abord sur la toile avant de peindre. Lissier, Abdoukarim n’a pas eu de métier à tisser après sa formation. C’est de là que lui est venue l’idée intégrer le tissage dans ses différentes toiles «J’ai commencé à faire des recherches, puis j’ai découvert cette technique. Donc, je tisse et en même temps, je peins».

De 1998-2001, Abdoukarim Fall a suivi une formation en tapisserie à Saint-Louis. Mais avant, il dessinait et peignait déjà. Utilisant, les matériaux de récupération comme le filet de pêche, le papier, Abdoukarim, n’a pas de soucis concernant les matières premières. «Ce qui est un peu difficile, c’est le travail», dit-il. Il est un peu difficile le travail parce que la finesse, l’adresse et la délicatesse que cela nécessite peut faire que la réalisation d’un tableau dure facilement un mois.

Abdoukarim Fall avait présenté ses œuvres en Allemagne en 2004, puis à Monaco où il a été primé en 2008. Il est l’initiateur des Itinéraires artistiques de Saint-Louis dont la 6o édition s’est déroulée en mars 2019, regroupant plus d’une vingtaine d’artistes.

Dans un art dont lui seul a le secret, l’artiste plasticien a repris des bâtiments remarquables chargés d’histoire tels que les tours jumelles, l’Eglise Morel et Prom, le pont Faidherbe qui a remplacé le pont de bateaux en 1897, le Palais du Gouverneur, la Gare qui date de 1908, l’Assemblée territoriale inaugurée en 1887, le Lycée Faidherbe, la Maison du patrimoine, des édifices aujourd’hui disparus et reconstruites en briques et portant des toitures de tuiles mécaniques.

Témoignages

Focus sur…… « kariMFall »

Critique d’art

Le Fil dans la Toile d’Abdoukarim.Fall

Exprimer mon avis sur l’écriture d’Abdou Karime Fall (AK.Fall) m’entraînerait sans doute vers un dépassement formel, en ces temps de crise sanitaire mondiale. La technique du tissage qu’il emploie avec constance révèle son profond intérêt pour le vivant, tout le vivant, et pour l’architecture délicate de l’araignée. AK.Fall nous rappelle que l’homme ne détient pas le monopole du langage, de la conscience, de l’émotion, de l’intelligence et de l’imagination. Les animaux créent souvent des œuvres plastiques inédites, intégrées dans la diversité des expressions du vivant. AK.Fall interroge notre essence humaine, au-delà des simples notions de proies ou de victimes. Dans ses toiles, il tisse un décor ré-enchanté, un ordre où il capte l’espoir de renouer avec notre humanité perdue. Nous pouvons vivre en harmonie sur cette terre et profiter de toutes ses ressources naturelles sans commettre d’écocides. Les hommes n’ont pas le monopole de la créativité, comme en témoignent les modèles d’architecture de certaines espèces animales.

AK.Fall s’est particulièrement penché sur la toile d’araignée, où toute la structure repose sur un fil, une ligne, un mouvement, une bio-architecture en phase avec le milieu de vie de cette espèce. Dans certains mythes Ashantis du Ghana, c’est en observant l’araignée tisser sa toile que les hommes auraient inventé la technique du tissage. L’araignée, souvent décrite dans les contes africains comme l’une des créatures les plus espiègles, est vue par Bernard Dadié, auteur du conte Le Pagne noir, comme un animal rusé et fourbe. Au Cameroun, chez les Bamilékés, l’araignée symbolise la royauté, et le roi est perçu comme une araignée vivant au centre de sa toile. Des sièges typiques sont créés pour exalter le comportement exemplaire de l’araignée, qui tisse les liens sociaux. Le roi doit s’inspirer de l’araignée dans ses interactions avec ses sujets. L’évolution de l’implication d’AK.Fall dans l’animation culturelle de la ville Saint-Louis démontre sa capacité à adapter sa stratégie pour s’intégrer dans son environnement. Sa première résidence de création remonte à 2001, au Centre Culturel de Saint-Louis, avec pour thème « Les taalibes de Mame Coumba Bang ».

Mame Coumba Bang est une source d’inspiration pour l’artiste. Créature composite, hybride, génie et grand-mère bienfaisante, elle est dotée de nombreux pouvoirs surnaturels. Dans les mythes africains qui inspirent les créateurs du continent, il existe une alliance, une parenté entre les hommes et les animaux. Le lien entre le sacré, la nature bienveillante, les hommes et les génies est entretenu dans la mémoire collective des communautés à travers contes et légendes. Dans ce contexte de changements climatiques, les sciences sociales intègrent l’impact de la conservation du patrimoine immatériel des communautés sur la gestion des ressources naturelles. Mame Coumba Bang est la protectrice des ressources halieutiques, de l’écosystème marin et des populations de pêcheurs, autant de référents auxquels s’identifie AK.Fall. Quant à « taalibe », selon la « Petite théorie facile » du poète Umar Sali, il renvoie au concept d’apprenant ou de laborantin, rassemblés autour du feu d’un maître qui leur transmet la connaissance. Ces enseignements permettent aux laborantins de sortir de l’obscurantisme et d’accéder à la lumière. Mame Coumba Bang est la prêtresse auprès de qui AK.Fall a trempé son pinceau pour la première fois en milieu professionnel.

Vingt ans après cette expérience inédite de workshop sur le thème « Les taalibes de Mame Coumba Bang », AK.Fall s’est épanoui, multipliant sa participation à diverses expositions nationales et internationales. Il n’est donc pas surprenant qu’il possède désormais sa propre galerie-atelier, où il expose son travail, parfois en symbiose avec celui de la communauté artistique, ravivant sans cesse la flamme de la création. Depuis 2013, AK.Fall orchestre régulièrement les Itinéraires Artistiques de Saint-Louis. Cet événement, à sa sixième édition en 2020 prend de l’ampleur et suscite un engouement croissant.

AK.Fall a fait ses humanités aux Ateliers Araignées de l’artiste Baye Mouké Traoré, maître de la tapisserie et figure emblématique de l’art contemporain, lauréat du Grand Prix du Chef de l’Etat pour les Arts en 1996. Baye Mouké Traoré a fondé à Saint-Louis une école où de nombreux jeunes, dont AK.Fall, ont été initiés aux métiers du design textile. Il n’est donc pas étonnant qu’AK.Fall soit fasciné par le tissage, car tout comme son maître, il est lissier et tapissier de formation. Dès lors, il n’est guère surprenant de découvrir dans son expression graphique la métaphore de l’araignée tisserande.

Enfin, nous retrouvons sa touche particulière, marquée par le souci du détail et de la netteté, qui anoblit la toile. De plus, il possède un sens esthétique qui capte le regard et les émotions. Ses peintures, décoratives et agréables à l’œil, trouvent parfaitement leur place dans nos intérieurs. Nous remarquons également l’absence de représentation de figures humaines ou animales. C’est la vision que je projette sur le travail d’AK.Fall, et je crois qu’elle est partagée par beaucoup d’autres.

Dakar, le 23 juin 2020

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